lundi 25 février 2013

Wolfgang Sawallisch (1923-2013)



Disparu vendredi à l'âge de 89 ans, sept ans après sa retraite forcée pour raisons de santé, mort dans le chagrin un mois après unique enfant Jörg, Wolfgang Sawallisch restera l'un des pianistes et surtout des chefs les plus marquants du siècle dernier. L'un des derniers grands représentants de la tradition du romantisme germanique, il fut aussi l'élève du grand chef français Igor Markevitch, et en son temps le plus jeune chef à apparaître à Bayreuth en y dirigeant Tristan en 1957. Il mena par la suite pendant plus de vingt ans les destinées de l'Opéra de Bavière (1971-1992) et pendant dix ans celles du Philadelphia Orchestra (1993-2003) avant de se retirer pour raisons de santé au milieu des années 2000. Petit tour des disques disponibles, en essayant toujours de renvoyer vers les pages les moins chères et de mentionner le meilleur prix constaté...

Un symphoniste des plus subtils

Parmi le legs discographique de Sawallisch, on peut d'abord retenir quelques cycles symphoniques remarquables, parmi les plus subtils et équilibrés qui soient, à commencer par ses Schumann avec la Staatskapelle de Dresde (EMI) (2 CD, environ 11 €), référence incontestable pour une intégrale des symphonies. Moins inoubliables, ses cycles Beethoven avec le Concertgebouw (EMI/Brilliant) (5 CD, environ 15 €) et Brahms avec le London Philharmonic (EMI) (3 CD, environ 7 €) sont des modèles d'équilibre esthétique manquant parfois un peu de tension (en revanche, les symphonies de Brahms avec les Wiener Symphoniker (Philips), très grises, sont à éviter). L'intégrale des symphonies de Mendelssohn avec le Philharmonia (EMI/Brilliant), enregistrée dans les années 1960, est de son côté moins connue et pourtant remarquable (7 CD avec les symphonies de jeunesse par Lev Markiz, environ 20 €), vive et colorée. Enfin, son intégrale des symphonies de Schubert avec le London Philharmonic (Philips) est également une référence, disponible dans la collection Duo en deux volumes de 2 CD : symphonies 1 à 4 et symphonies 5 à 9 (environ 10 € chacun).

Sawallisch a également enregistré dans les deux dernières décennies de sa carrière quelques références plus rares, des témoignages précieux (mais plus onéreux), disponibles particulièrement chez Orfeo. C'est le cas des symphonies 1 et 2 de Weber avec l'orchestre de la radio bavaroise, et de la symphonie n°3 de Furtwängler, avec l'Orchestre d'État de Bavière. Il faut enfin mentionner ses Bruckner d'une grande clarté, à mi-chemin entre Böhm et Schuricht : les symphonies 1, 5, 6 et 9 avec l'Orchestre d'État de Bavière en CD séparés chez Orfeo, et la symphonie n° 4 avec Philadelphie (EMI).

Un accompagnateur précieux

Nombreux furent les artistes à témoigner de la qualité du Sawallisch accompagnateur, aussi bien au piano que sur l'estrade. Sawallisch fut ainsi le principal accompagnateur de Dietrich Fischer-Dieskau pour ses enregistrements de Lieder de Brahms chez EMI (EMI, épuisé). Avec Fischer-Dieskau également, les 2 CD de Lieder de Strauss enregistrés pour DG sont également épuisés et introuvables à un prix raisonnable...

On retrouve également Sawallisch avec Lucia Popp, pour un récital Strauss repris sous coffret EMI Icon (7 CD, environ 15 €) , avec Margaret Price, encore pour un récital Strauss (EMI, 7 €) et pour remarquable album Schubert (Orfeo, environ 15 €), ainsi que plus récemment avec Thomas Hampson, à ses côtés pour le Winterreise de Schubert (EMI, promotion 4,99 € sur Amazon.fr) et pour un excellent récital de Lieder de Schumann sur des textes de Heine (EMI, environ 8 € d'occasion). Et, pour revenir à Strauss, que Sawallisch fréquenta tant, on peut citer les albums de Barbara Hendricks (4 derniers Lieder) (EMI) et par Hermann Prey (Philips), épuisés cependant.

En musique de chambre, Wolfgang Sawallisch lègue principalement une intégrale de la musique de chambre de Richard Strauss dans laquelle il tient la partie de piano, originellement parue sous étiquette Arts, et désormais reprise dans l'édition Strauss de Brilliant (35 CD, environ 45 €).

Enfin, parmi les enregistrements concertants, on retiendra les plus réussis : les concertos pour piano n° 21 et 22 de Mozart par Annie Fischer (EMI/Bergé, 8 €), concertos pour cor de Strauss par Dennis Brain (EMI, 12 € d'occasion), ou encore parmi les références les moins anciennes, les concertos pour piano de Brahms par Stephen Kovacevich (en promotion à 4,99 € sur Amazon.fr) et le concerto pour violoncelle de Dvorak par Natalia Gutman (EMI, environ 5 €, couplé à la 7e de Dvorak avec Philadelphie).

L'opéra et la musique chorale, domaines de prédilection

Mais le principal legs de Sawallisch concerne peut-être avant tout la musique lyrique et chorale. Au cœur de ses enregistrements d'opéra : Wagner et Strauss, comme pour les chefs dont on peut aisément le rapprocher, à commencer par Böhm. Pour Wagner, on se tournera avant tout vers les live. Ceux jadis publiés sous étiquette Philips/Decca, notamment un Lohengrin de référence, sont hélas épuisés. Le catalogue EMI n'est pas beaucoup mieux mis en valeur : le Ring du Bayerische Staatsoper est largement épuisé (environ 50 € d'occasion), et l'on doit se contenter des Maîtres chanteurs de 1993, avec Weikl, Heppner et Studer, en réédition à paraître le 25 mars (environ 20 €). Enfin, quelques live majeurs sont disponibles ailleurs, comme le Tristan de ses débuts avec Birgit Nilsson et Wolfgang Windgassen en 1958 (Myto), le Vaisseau fantôme de 1959 à Bayreuth (Golden Melodram). L'indispensable Rienzi chez Orfeo est hélas épuisé...

Du côté de Richard Strauss, si Elektra avec Eva Marton (EMI, environ 10 €) est soumise à rude concurrence, et balayée (sauf pour la prise de son...) par le live avec Birgit Nilsson en Italie, en 1971 (Opera d'oro, environ 8 €), en revanche le studio de Capriccio avec Schwartzkopf, pour EMI en 1957 (bien réédité par Naxos) est tout à fait à la hauteur de sa réputation. Il ne faudrait pas pour autant oublier le superbe Arabella avec Julia Varady et Fischer-Dieskau (Orfeo), enregistré avec l'orchestre d'État de Bavière.

Deux références lyriques supplémentaires sont à ne pas oublier. Mozart d'abord, avec La Flûte enchantée : si le DVD avec Popp et Gruberova, mis en scène par Everding (DG, environ 12 €) est déjà superbe, la version CD enregistrée pour EMI avec Anneliese Rothenberger, Edda Moser, Peter Schreier et Walter Berry est lumineuse, s'imposant parmi les meilleures... et elle se trouve aux environs de 5 € ! Enfin, Sawallisch laisse un Barbe-Bleue de Bartok, avec Fischer-Dieskau et Varady (DG), version intéressante, épuisée mais disponible d'occasion sur Marketplace, autour de 10 €.

Enfin, peut-être la réalisation la plus aboutie, la plus indispensable du chef : l'intégrale des œuvres chorales sacrées et profanes de Schubert (EMI), enregistrée avec la radio bavaroise et disponible en coffret 11 CD à moins de 25 €, est un monument incontournable, servi par une nuée de solistes magnifiques (Fischer-Dieskau, Popp, Schreier, Donath, Tear, Behrens, Fassbaender...). On peut trouver un aperçu de cette réussite esthétique avec la Deutsche Messe, l'un des quelques disques de Schubert qui n'ont pas de prix (mais qui, en l'occurrence, coûte moins de 5 €).